DROIT D'AUTEUR ET IA
De nos jours, le droit reconnaît à l’auteur un droit de propriété sur son œuvre. Une propriété intellectuelle portant non pas sur la chose, l’objet matériel de sa création, mais sur son essence, une singularité propre à chaque auteur qui confère à celui-ci un droit exclusif d’exploitation de ce qu'il a créé.
En effet, a été posé le principe que l’œuvre se crée dans l’espace privé d’un être, dans son intimité et qu’ainsi elle porte l’empreinte de son créateur, sa personnalité, son originalité. Oui, c’est bien de ce postulat, du fait qu’une œuvre est unique, qu’elle émane d’un sujet, en tant qu’entité propre, que celui-ci peut revendiquer un droit de propriété.
Mais voilà qu’aujourd’hui, l’intelligence artificielle nous montre ce que nous avions oublié. Ce que notre droit, pour faire une place à l’auteur, une place différente des autres acteurs de notre société, a mis de côté.
Voilà que les machines se sont mises à créer. Pour cela, elles ont imité les auteurs. Comme eux, elles ont puisé dans une culture universelle, faite de sons, d’images et de textes. Comme eux, elles s’en sont imprégnées, inspirées.
Elles nous rappellent alors que les êtres humains ne peuvent écrire, imaginer ce qui n’a jamais été créé. Une œuvre n’est pas seulement le fruit d’une personne isolée dans son intimité. Elle porte l’empreinte d’une foule d’individus de toutes les cultures, et aussi de quelque chose qui nous dépasse et n’appartient à personne.
On pense à l’antiquité et à ses muses, au Moyen Âge ou encore à l’époque baroque où l’auteur signait ses œuvres de cette phrase Soli Deo Gloria, à Dieu seul la gloire. Au temps où on pensait que l’œuvre n’était que l’expression d’un message qu’il ne faisait que recevoir, transmettre sans qu'il leur appartienne.
Sauf qu’aujourd’hui, les GAFAM qui ont développé ces systèmes et modèles d’intelligence artificielle, revendiquent un droit. D’abord, un droit sous forme d’abonnement à ces contenus qu'ils ont glanés, moissonnés, traités indûment et un droit sur ce qu'ils produisent à partir de notre patrimoine commun, faisant bientôt des auteurs, des fournisseurs de contenus, que les robots remâchent et qui délivrent en contrepartie d’une rémunération.
Des droits, un pouvoir, qui seraient renforcés si le droit d'auteur basculait dans le droit du travail, en asservissant les auteurs à un "lien de subordination".
Plus que jamais se pose la question :
Quelle place notre société veut-elle donner aux créateurs ?